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Il y a en Ile de France 315 000 demandeurs de logements sociaux mais le problème se pose sur tout le territoire. Dans la majorité des villes de France l’accès au logement est devenu au fil des ans pratiquement inaccessible pour les personnes et familles qui ont comme seules ressources les minima sociaux. Au delà des personnes sans ressources, ce sont désormais les salariés à faibles revenus qui se voient exclus de l’accès au logement
Les plafonds pour obtenir le Fond de solidarité au logement (FSL) sont nettement sous évalués et tiennent de moins en moins compte de la réalité du marché.
Aujourd’hui les assistants sociaux sont confrontés non seulement à la rareté des logements mais aussi à l’indécence, voire l’insalubrité récurrente des espaces d’habitation subie par une part de plus en plus importante de la population.
Les récents incendies qui se sont traduit par la mort de 53 personnes dont 36 enfants révèlent la dramatique gravité de la situation. C’est la population la plus fragile qui est la première victime de l’absence d’une politique de logement à la hauteur des besoins. La population étrangère en attente de régularisation est la plus touchée.
Aujourd’hui nous ne pouvons que constater l’impuissance des pouvoirs publics. Les services sociaux sont constamment interpellés sans pouvoir apporter de réponses satisfaisantes même à titre provisoire. Les centres d’hébergements affichent complet. L’accès au logement étant très limité c’est tout le dispositif d’accueil d’urgence qui est bloqué. Les professionnels sont choqués de constater qu’en l’absence de réponses adaptées, des familles avec enfants qui sortent des services sociaux n’ont pour seule solution que de passer la nuit dehors.
Pourtant, les propositions ne manquent pas. Encore faut-il en tenir compte et les mettre en œuvre. Dans un document regroupant les analyses et constats de la profession nous rappelons que la politique d’accès au logement doit se traduire par un ensemble de mesures cohérentes les unes par rapport aux autres. Ainsi il faut
I. Coordonner, informer, simplifier
II. Améliorer le fonctionnement institutionnel
III. Développer l’offre de logement
IV. Sécuriser les bailleurs
V. Solvabiliser et responsabiliser les locataires
VI. Permettre au services sociaux d’assumer ses missions: accompagner, faciliter, innover
C’est le sens du dossier ci-joint réalisé par des assistants de service social confrontés quotidiennement à la question de l’accès au logement. »
Nos propositions
1. Coordonner, informer, simplifier
* Créer des « Maison de l’Habitat » instances de coordination et d’information qui associent las usagers les pouvoirs publics et les professionnels autour de la question du logement :
- Lieu de renseignements sur le logement aussi bien du parc public que privé
- Recensement des logements vacants dans le public et le privé.
- Listing des différents organismes HLM, situation des lieux d’implantation
- Élaboration d’une fiche technique claire avec des informations et conseils pratiques à connaître, remise avant l’entrée dans un logement
* Simplifier les demandes en HLM par :
- Harmonisation et création d’un dossier unique de demande de logement
- Mettre en place un vrai numéro unique départemental (dans certains département celui qui existe déjà reste formel, puisque chaque organisme attribue en plus son propre numéro et demande le renouvellement de toutes les pièces, il apporte donc complication et confusion).
- Fournir les pièces du dossier une seule fois.
- Faciliter le renouvellement de la demande : l’organisme coordinateur écrirait au bout d’un an en invitant le demandeur à signaler uniquement les changements.
- Faciliter les possibilités d’échanges de logement au sein de la même société HLM.
- Assouplir les pièces à fournir : ne demander que des documents utiles à la demande et conformes à l’éthique.
- Tenir compte des revenus de la situation présente (ex : en cas de séparation et en attente du jugement de divorce, CAF, pension alimentaire… ) pour mieux solvabiliser le locataire.
* Diffuser l’information sur le logement très largement de manière plus concrète de ce qui est déjà fait par les associations de consommateurs :
- Charges à régler,
- Bail,
- Certaines règles de vie en communauté.
2. Améliorer le fonctionnement institutionnel
* Le service relogement dans les Préfectures :
- Augmenter leurs effectifs.
- Envoyer aussi des accusés de réception aux professionnels qui rédigent les rapports de situation sociale. Les informer de l’avancement du traitement des demandes
* Le dispositif du Fonds de Solidarité au Logement (FSL) :
- Meilleure transparence sur les critères d’accès du FSL en associant réellement usagers et professionnels de terrain afin qu’une remontée de la réalité des coûts et des conditions d’accès aux logements soient pris en compte
- Simplifier les imprimés. Retrait de l’imprimé « demande de FSL » en saisine directe, uniquement après une information adaptée à chaque situation.
- Assouplir les exigences
- Accélérer l’accord de principe et le versement du FSL. Éviter que les personnes ne soient obligées à faire l’avance, qu’elles aient droit à la même équité de traitement (délais de réactivité plus court ).
- Uniformiser la garantie de loyer par le FSL
- Pérenniser les financements sur le long terme des projets et l’accompagnement liés au logement.
* Le dispositif RMI ( Conseil généraux )
- Traiter prioritairement la question du logement et de son accès dans les plans départementaux d’insertion ainsi que dans les procédures de validation des contrats d’insertion présentés dans les C.L.I.
* La Caisse d’Allocations Familiales :
- Ne pas interrompre l’allocation logement en cas d’impayés, mais permettre au propriétaire d’intenter une action.
* La Commission d’attribution H.L.M. :
- Création de commission d’urgences
- Redéfinir les procédure d’urgence et ses critères
- Informer les différents partenaires, et en particulier les élus, sur les critères de procédure d’urgence, afin d’éviter que les élus orientent vers les professionnels des personnes qui ne relèvent pas de cette priorité.
- Meilleure transparence des critères d’attribution des logements
- Éviter de demander plusieurs rapports sociaux pour une même demande.
- Permettre une représentation des travailleurs sociaux aux commissions d’attribution des logements HLM, afin de défendre tous les demandeurs de logement.
* La loi, les élus :
- Impliquer davantage les élus municipaux.
- Clarifier dans la loi BORLOO ce qu’on entend par « locataire de bonne foi » : éviter les pratiques liées à une forme de « méritocratie » discriminante
- Réunir les différents partenaires concernés par le logement, notamment le Conseil Général, la Préfecture, les bailleurs publics, la C.A.F., afin d’éviter tout cloisonnement, de mener une réflexion commune, d’œuvrer ensemble pour lever les freins.
- Mettre un arrêt au développement de structures privées de type « marchands de listes » qui tout en ponctionnant financièrement les candidats à l’accès au logement n’apportent aucune proposition nouvelle.
* Créer une Commission Hygiène et Salubrité :
- Création d’une instance obligeant les propriétaires à faire les travaux dans les logements insalubres
- Annulation du paiement du loyer jusqu’à la réalisation des travaux par le propriétaire, tant dans le parc public que privé. Possibilité de saisir la Préfecture ?, la DDASS ?
- Vérification de l’adéquation entre le montant du loyer et la qualité du logement, notamment dans le cadre du FSL. Confier à la CAF le contrôle et la délivrance des pénalités ?
3 Développer l’offre de logement
* Construire des logements neufs :
- Faire réellement appliquer la loi qui prévoit que chaque municipalité doit favoriser la construction de logements sociaux à hauteur de 20% des logements de la commune. Le paiement d’une amende n’a aucun effet sur l’augmentation de l’offre de logements sociaux. Il apparaît nécessaire d’aller plus loin.
- Explorer la piste de l’auto-construction : après la seconde guerre mondiale, des pratiques d’auto construction collective se sont développées (les Castors) et ont ainsi permis l’accès à un logement pour les personnes mal logées. Ce type d’action existe dans certains pays sous forme de coopératives.
- Construire des logements utilisant des énergies économiques selon les régions : solaire, bois, géothermie…
* Optimiser et récupérer le logement existant :
- Repérer les logements vacants. Qu’en est-il de la loi sur la réquisition des logements vacants et des amendes aux propriétaires ?
- Appliquer les mesures adoptées dans les Plans Départementaux au Logement
- Développer la possibilité de bail à réhabilitation prévue dans la loi Besson.
- Élargir le nombre de logements concernés par ce bail et mieux financer les travaux des propriétaires. Dans certaines municipalités, des associations ont recensé le parc locatif privé, passé convention afin de développer le bail à réhabilitation, mais les financements s’avèrent insuffisants pour répondre à la demande des petits propriétaires : ils n’ont pas les moyens financiers de départ pour avancer les fonds dans l’attente d’un remboursement sur factures acquittées. Les structures institutionnelles fonctionnent de manière très rigide.
- Augmenter l’offre d’appartements en bail glissant
* Diversifier les possibilités de logement :
- Étudier les possibilités de colocation, notamment pour les personnes seules, les jeunes dans le logement public ou privé.
- Favoriser la sous-location et le principe du bail glissant
- Favoriser le logement alterné ; dans certains départements, il existe un important parc de logements réservés à la location saisonnière et d’un autre côté les étudiants ont beaucoup de mal à se loger. Il est possible d’expérimenter un système de location alterné : logement d’été pour les touristes, logement d’hiver pour les étudiants.
- Partager le logement entre personnes âgées, disposant d’un grand logement peu occupé, et étudiants en échange de divers services. Cette expérience existe en Espagne (Barcelone), le partage fait l’objet d’une contractualisation. Les étudiants pourraient aussi trouver logement auprès des agriculteurs.
- Équiper les logements de manière à éviter pour certains les frais importants d’équipement.
- Constituer, comme en Italie, un réseau de pensions de famille. Il permettrait aux personnes seules de se loger et de bénéficier de services communs : ménage, repas… cela pourrait être une réponse logement pour un certain type de public.
- Penser à un logement adapté aux personnes déstructurées qui vont de la rue au squat, au CHRS, et qui retournent du CHRS à la rue faute de structures et d’accompagnent social à l’occupation d’un logement classique.
- Créer des aires de stationnement correctes, avec les aménagements nécessaires aux personnes qui ont choisi de vivre autrement dans des logements de type caravane, mobil home. De plus, ce type de logement pourrait concerner les travailleurs saisonniers et les étudiants. Leur faciliter aussi des crédits pour l’achat de petits terrains.
* Développer les initiatives existantes, en inventer d’autres :
- Développer les agences immobilières à caractère social.
- Créer une bourse du logement dans le parc privé et public afin de favoriser les échanges en cas de changement de situation familiale.
- Organiser un financement solidaire pour l’acquisition ou la location d’immeubles ou d’appartements dans le parc public ou privé, favoriser l’accompagnement social des occupants, telle l’expérience de l’Association Habitat et Humanisme.
4 Sécuriser les bailleurs
* Encourager les propriétaires :
- Développer des pratiques de médiation Propriétaire – Bailleur afin d’éviter que des situations se dégradent et garantir ainsi au propriétaire
- Modifier les textes sur le logement loué à des personnes en situation précaire ; les plafonds de loyers sont trop bas, non incitatifs, délai trop long.
- Favoriser et développer les baux glissants.
- Organiser ou mieux faire connaître les mesures financières en faveur du bailleur qui loue son logement (ANAH).
- Rechercher le risque minimal en matière d’impayés de loyer avec notamment une simplification du versement direct de l’allocation logement au propriétaire. Toutefois, le risque d’impayé demeure pour les populations de locataires les plus fragilisés,
la suppression de l’allocation logement en cas de dette ne résout pas le problème et au contraire ne fait que l’aggraver. Le FSL maintien pourrait être un moyen permettant d’agir sur les petites dettes sans attendre qu’elles ne deviennent trop importantes,
- Garantir les impayés de loyers ainsi que les risques de dégradations :
- Mieux faire tourner les logements en cas de sur-occupation et de sous-occupation. Pour les bailleurs publics, le prévoir dans le bail.
- Utiliser le sur loyer payé à un fonds d’investissement en vue de la construction ou la rénovation.
- Modifier la loi protégeant les locataires de mauvaise foi ne réglant pas leurs loyers malgré leurs ressources : Dans ce cas et dans ce cas seulement une disposition de la loi devrait permettre une saisie à la source des revenus des montants de loyer (avec un plafond maximal ). Dans tous les cas il est nécessaire d’accélérer les délais des procédures car plus les délais sont longs et sans solutions, plus les relations se dégradent. Les propriétaires ont besoin eux aussi de percevoir le loyer, les impayés ont parfois de conséquences graves pour le propriétaire.
5 Solvabiliser et responsabiliser les locataires
* Assurer et développer les ressources des personnes :
- Limiter les augmentations de loyers car pour la plupart des situations le taux d’effort à consentir dépasse le tiers des revenus.
- Sécuriser le paiement des loyers par le versement direct généralisé de l’APL ou l’AL.
- Travailler sur la continuité du versement de l’APL et l’AL, montant qui varie du double au simple en fonction du changement de statut de la personne.
- Inclure dans la construction des immeubles des jardins sociaux potagers, pour augmenter en « nature » les revenus.
- Mise en place de réseaux d’échange de savoirs et de services : cuisine, bricolage, couture etc., qui favorisent la mixité des populations.
- Revaloriser l’image des quartiers qui ont été réhabilités et qui, malgré cela restent stigmatisés. Dans ce sens, créer des structures de vie de quartier et/ou dynamiser celles existantes.
* Aider à l’amélioration des comportements :
- Prendre en compte les difficultés de comportement (incivilités, dégradations, etc.) dès qu’elles se manifestent et assurer un accompagnement éducatif à l’entrée dans les lieux et aussi longtemps qu’il le faut (au lieu d’un an comme prévu généralement).
- Instaurer une mesure d’accompagnement à l’entretien du logement afin de garantir au propriétaire la non dégradation de son bien. Des expériences telles celle de l’agence sociale (AIVS) sur l’agglomération toulonnaise ou des Compagnons Bâtisseurs à Marseille sont à développer.
- Créer des ateliers de petits bricolages, par le biais des associations de locataires dans les groupes d’immeubles, afin de développer et mutualiser les compétences et réduire les frais.
- Développer la fonction de gardien ou de concierge chargé du suivi de l’immeuble, des petits travaux…
6. Rôle du travail social : accompagner, faciliter, innover
* Assurer un accompagnement sur le long terme :
- Accompagner le locataire sur deux niveaux : niveau financier (assurer le paiement du loyer), et au niveau du comportement (apprendre à investir, à apprécier, à prendre soin de son logement).
- Assurer un travail éducatif après du locataire, notamment sur les charges maîtrisables.
- Réfléchir l’accompagnement sur le long terme, deux ou trois ans après, assurer un suivi.
- Susciter l’adhésion de la personne, du locataire dès la phase accès au logement en posant clairement les enjeux.
- Assurer un double accompagnement des locataires ET des propriétaires. Les propriétaires demandent à être reçus par les services sociaux et les associations liées au logement ; beaucoup jouent le jeu du FSL et souhaitent être plus entendus et accompagnés sur le long terme.
- Systématiser l’accompagnement social en réservant une autre place aux propriétaires. Permettre au propriétaired’avoir un référent social rencontré au moment de la signature du bail.
- Donner le temps nécessaire à l’accompagnement, cette notion de temps semble indispensable
* Faciliter et créer des ponts et des liens :
- Imaginer des ponts entre les parties : locataires, bailleurs, institutions sociales
- Assurer un rôle de « médiation » entre chacun. Dans chaque association ou dans la Maison de l’Habitat, créer un service avec une personne chargée du suivi avec chaque partie. Cette personne doit être formée, mobilisée et spécialisée.
- Améliorer les rapports entre les locataires et offices d’HLM : le locataire est une personne et non un dossier.
- Trouver plus de souplesse dans les liens entre les bailleurs et les travailleurs sociaux, notamment du Conseil Général.
- Assurer des passerelles d’information et de coordination.
En conclusion « ENSEMBLE LEVONS LES FREINS ! »
il apparaît plus que jamais nécessaire pour les services sociaux d’innover et être force de propositions :
- Imaginons un réel travail en réseau sur le même principe et fonctionnement que les REAAP (Réseau d’Ecoute, d’Appui et d’Accompagnement à la Parentalité). Ce réseau serait centralisateur et servirait de relais pour les questions de logement.
- Créons des structure de coordination sur le logement qui répondent en priorité à la demande sociale
- Mettons en place des postes de médiateurs, avec une formation initiale de travailleur social.
- Créons des nouveaux partenariats avec des organismes privés : élargir, ouvrir.
- Favorisons la création d’ateliers « échanges de savoirs », « petit bricolage ». Les élargir à un public non bénéficiaire des minima sociaux.
- Organisons et faisons circuler l’information sur le logement.
Les travailleurs sociaux seuls ne pourront rien. Seule une véritable mobilisation de proximité avec l’ensemble des acteurs mais aussi la population concernée peut permettre d’enrayer un processus qui exclue des familles entières de l’accès au logement sur des critères uniquement économiques. Notre capacité d’accueillir, d’apporter un toit et une sécurité à la population la plus exclue est la mise en œuvre d’un des fondements du pacte républicain : celui qui repose sur la fraternité. Le bien être de tous passe aussi par le bien être des plus fragiles. C’est aussi pourquoi il nous apparaît primordial d’agir de toute urgence sur la question de l’accès au logement qui reste au cœur de la question sociale aujourd’hui.
Les plafonds pour obtenir le Fond de solidarité au logement (FSL) sont nettement sous évalués et tiennent de moins en moins compte de la réalité du marché.
Aujourd’hui les assistants sociaux sont confrontés non seulement à la rareté des logements mais aussi à l’indécence, voire l’insalubrité récurrente des espaces d’habitation subie par une part de plus en plus importante de la population.
Les récents incendies qui se sont traduit par la mort de 53 personnes dont 36 enfants révèlent la dramatique gravité de la situation. C’est la population la plus fragile qui est la première victime de l’absence d’une politique de logement à la hauteur des besoins. La population étrangère en attente de régularisation est la plus touchée.
Aujourd’hui nous ne pouvons que constater l’impuissance des pouvoirs publics. Les services sociaux sont constamment interpellés sans pouvoir apporter de réponses satisfaisantes même à titre provisoire. Les centres d’hébergements affichent complet. L’accès au logement étant très limité c’est tout le dispositif d’accueil d’urgence qui est bloqué. Les professionnels sont choqués de constater qu’en l’absence de réponses adaptées, des familles avec enfants qui sortent des services sociaux n’ont pour seule solution que de passer la nuit dehors.
Pourtant, les propositions ne manquent pas. Encore faut-il en tenir compte et les mettre en œuvre. Dans un document regroupant les analyses et constats de la profession nous rappelons que la politique d’accès au logement doit se traduire par un ensemble de mesures cohérentes les unes par rapport aux autres. Ainsi il faut
I. Coordonner, informer, simplifier
II. Améliorer le fonctionnement institutionnel
III. Développer l’offre de logement
IV. Sécuriser les bailleurs
V. Solvabiliser et responsabiliser les locataires
VI. Permettre au services sociaux d’assumer ses missions: accompagner, faciliter, innover
C’est le sens du dossier ci-joint réalisé par des assistants de service social confrontés quotidiennement à la question de l’accès au logement. »
Nos propositions
1. Coordonner, informer, simplifier
* Créer des « Maison de l’Habitat » instances de coordination et d’information qui associent las usagers les pouvoirs publics et les professionnels autour de la question du logement :
- Lieu de renseignements sur le logement aussi bien du parc public que privé
- Recensement des logements vacants dans le public et le privé.
- Listing des différents organismes HLM, situation des lieux d’implantation
- Élaboration d’une fiche technique claire avec des informations et conseils pratiques à connaître, remise avant l’entrée dans un logement
* Simplifier les demandes en HLM par :
- Harmonisation et création d’un dossier unique de demande de logement
- Mettre en place un vrai numéro unique départemental (dans certains département celui qui existe déjà reste formel, puisque chaque organisme attribue en plus son propre numéro et demande le renouvellement de toutes les pièces, il apporte donc complication et confusion).
- Fournir les pièces du dossier une seule fois.
- Faciliter le renouvellement de la demande : l’organisme coordinateur écrirait au bout d’un an en invitant le demandeur à signaler uniquement les changements.
- Faciliter les possibilités d’échanges de logement au sein de la même société HLM.
- Assouplir les pièces à fournir : ne demander que des documents utiles à la demande et conformes à l’éthique.
- Tenir compte des revenus de la situation présente (ex : en cas de séparation et en attente du jugement de divorce, CAF, pension alimentaire… ) pour mieux solvabiliser le locataire.
* Diffuser l’information sur le logement très largement de manière plus concrète de ce qui est déjà fait par les associations de consommateurs :
- Charges à régler,
- Bail,
- Certaines règles de vie en communauté.
2. Améliorer le fonctionnement institutionnel
* Le service relogement dans les Préfectures :
- Augmenter leurs effectifs.
- Envoyer aussi des accusés de réception aux professionnels qui rédigent les rapports de situation sociale. Les informer de l’avancement du traitement des demandes
* Le dispositif du Fonds de Solidarité au Logement (FSL) :
- Meilleure transparence sur les critères d’accès du FSL en associant réellement usagers et professionnels de terrain afin qu’une remontée de la réalité des coûts et des conditions d’accès aux logements soient pris en compte
- Simplifier les imprimés. Retrait de l’imprimé « demande de FSL » en saisine directe, uniquement après une information adaptée à chaque situation.
- Assouplir les exigences
- Accélérer l’accord de principe et le versement du FSL. Éviter que les personnes ne soient obligées à faire l’avance, qu’elles aient droit à la même équité de traitement (délais de réactivité plus court ).
- Uniformiser la garantie de loyer par le FSL
- Pérenniser les financements sur le long terme des projets et l’accompagnement liés au logement.
* Le dispositif RMI ( Conseil généraux )
- Traiter prioritairement la question du logement et de son accès dans les plans départementaux d’insertion ainsi que dans les procédures de validation des contrats d’insertion présentés dans les C.L.I.
* La Caisse d’Allocations Familiales :
- Ne pas interrompre l’allocation logement en cas d’impayés, mais permettre au propriétaire d’intenter une action.
* La Commission d’attribution H.L.M. :
- Création de commission d’urgences
- Redéfinir les procédure d’urgence et ses critères
- Informer les différents partenaires, et en particulier les élus, sur les critères de procédure d’urgence, afin d’éviter que les élus orientent vers les professionnels des personnes qui ne relèvent pas de cette priorité.
- Meilleure transparence des critères d’attribution des logements
- Éviter de demander plusieurs rapports sociaux pour une même demande.
- Permettre une représentation des travailleurs sociaux aux commissions d’attribution des logements HLM, afin de défendre tous les demandeurs de logement.
* La loi, les élus :
- Impliquer davantage les élus municipaux.
- Clarifier dans la loi BORLOO ce qu’on entend par « locataire de bonne foi » : éviter les pratiques liées à une forme de « méritocratie » discriminante
- Réunir les différents partenaires concernés par le logement, notamment le Conseil Général, la Préfecture, les bailleurs publics, la C.A.F., afin d’éviter tout cloisonnement, de mener une réflexion commune, d’œuvrer ensemble pour lever les freins.
- Mettre un arrêt au développement de structures privées de type « marchands de listes » qui tout en ponctionnant financièrement les candidats à l’accès au logement n’apportent aucune proposition nouvelle.
* Créer une Commission Hygiène et Salubrité :
- Création d’une instance obligeant les propriétaires à faire les travaux dans les logements insalubres
- Annulation du paiement du loyer jusqu’à la réalisation des travaux par le propriétaire, tant dans le parc public que privé. Possibilité de saisir la Préfecture ?, la DDASS ?
- Vérification de l’adéquation entre le montant du loyer et la qualité du logement, notamment dans le cadre du FSL. Confier à la CAF le contrôle et la délivrance des pénalités ?
3 Développer l’offre de logement
* Construire des logements neufs :
- Faire réellement appliquer la loi qui prévoit que chaque municipalité doit favoriser la construction de logements sociaux à hauteur de 20% des logements de la commune. Le paiement d’une amende n’a aucun effet sur l’augmentation de l’offre de logements sociaux. Il apparaît nécessaire d’aller plus loin.
- Explorer la piste de l’auto-construction : après la seconde guerre mondiale, des pratiques d’auto construction collective se sont développées (les Castors) et ont ainsi permis l’accès à un logement pour les personnes mal logées. Ce type d’action existe dans certains pays sous forme de coopératives.
- Construire des logements utilisant des énergies économiques selon les régions : solaire, bois, géothermie…
* Optimiser et récupérer le logement existant :
- Repérer les logements vacants. Qu’en est-il de la loi sur la réquisition des logements vacants et des amendes aux propriétaires ?
- Appliquer les mesures adoptées dans les Plans Départementaux au Logement
- Développer la possibilité de bail à réhabilitation prévue dans la loi Besson.
- Élargir le nombre de logements concernés par ce bail et mieux financer les travaux des propriétaires. Dans certaines municipalités, des associations ont recensé le parc locatif privé, passé convention afin de développer le bail à réhabilitation, mais les financements s’avèrent insuffisants pour répondre à la demande des petits propriétaires : ils n’ont pas les moyens financiers de départ pour avancer les fonds dans l’attente d’un remboursement sur factures acquittées. Les structures institutionnelles fonctionnent de manière très rigide.
- Augmenter l’offre d’appartements en bail glissant
* Diversifier les possibilités de logement :
- Étudier les possibilités de colocation, notamment pour les personnes seules, les jeunes dans le logement public ou privé.
- Favoriser la sous-location et le principe du bail glissant
- Favoriser le logement alterné ; dans certains départements, il existe un important parc de logements réservés à la location saisonnière et d’un autre côté les étudiants ont beaucoup de mal à se loger. Il est possible d’expérimenter un système de location alterné : logement d’été pour les touristes, logement d’hiver pour les étudiants.
- Partager le logement entre personnes âgées, disposant d’un grand logement peu occupé, et étudiants en échange de divers services. Cette expérience existe en Espagne (Barcelone), le partage fait l’objet d’une contractualisation. Les étudiants pourraient aussi trouver logement auprès des agriculteurs.
- Équiper les logements de manière à éviter pour certains les frais importants d’équipement.
- Constituer, comme en Italie, un réseau de pensions de famille. Il permettrait aux personnes seules de se loger et de bénéficier de services communs : ménage, repas… cela pourrait être une réponse logement pour un certain type de public.
- Penser à un logement adapté aux personnes déstructurées qui vont de la rue au squat, au CHRS, et qui retournent du CHRS à la rue faute de structures et d’accompagnent social à l’occupation d’un logement classique.
- Créer des aires de stationnement correctes, avec les aménagements nécessaires aux personnes qui ont choisi de vivre autrement dans des logements de type caravane, mobil home. De plus, ce type de logement pourrait concerner les travailleurs saisonniers et les étudiants. Leur faciliter aussi des crédits pour l’achat de petits terrains.
* Développer les initiatives existantes, en inventer d’autres :
- Développer les agences immobilières à caractère social.
- Créer une bourse du logement dans le parc privé et public afin de favoriser les échanges en cas de changement de situation familiale.
- Organiser un financement solidaire pour l’acquisition ou la location d’immeubles ou d’appartements dans le parc public ou privé, favoriser l’accompagnement social des occupants, telle l’expérience de l’Association Habitat et Humanisme.
4 Sécuriser les bailleurs
* Encourager les propriétaires :
- Développer des pratiques de médiation Propriétaire – Bailleur afin d’éviter que des situations se dégradent et garantir ainsi au propriétaire
- Modifier les textes sur le logement loué à des personnes en situation précaire ; les plafonds de loyers sont trop bas, non incitatifs, délai trop long.
- Favoriser et développer les baux glissants.
- Organiser ou mieux faire connaître les mesures financières en faveur du bailleur qui loue son logement (ANAH).
- Rechercher le risque minimal en matière d’impayés de loyer avec notamment une simplification du versement direct de l’allocation logement au propriétaire. Toutefois, le risque d’impayé demeure pour les populations de locataires les plus fragilisés,
la suppression de l’allocation logement en cas de dette ne résout pas le problème et au contraire ne fait que l’aggraver. Le FSL maintien pourrait être un moyen permettant d’agir sur les petites dettes sans attendre qu’elles ne deviennent trop importantes,
- Garantir les impayés de loyers ainsi que les risques de dégradations :
- Mieux faire tourner les logements en cas de sur-occupation et de sous-occupation. Pour les bailleurs publics, le prévoir dans le bail.
- Utiliser le sur loyer payé à un fonds d’investissement en vue de la construction ou la rénovation.
- Modifier la loi protégeant les locataires de mauvaise foi ne réglant pas leurs loyers malgré leurs ressources : Dans ce cas et dans ce cas seulement une disposition de la loi devrait permettre une saisie à la source des revenus des montants de loyer (avec un plafond maximal ). Dans tous les cas il est nécessaire d’accélérer les délais des procédures car plus les délais sont longs et sans solutions, plus les relations se dégradent. Les propriétaires ont besoin eux aussi de percevoir le loyer, les impayés ont parfois de conséquences graves pour le propriétaire.
5 Solvabiliser et responsabiliser les locataires
* Assurer et développer les ressources des personnes :
- Limiter les augmentations de loyers car pour la plupart des situations le taux d’effort à consentir dépasse le tiers des revenus.
- Sécuriser le paiement des loyers par le versement direct généralisé de l’APL ou l’AL.
- Travailler sur la continuité du versement de l’APL et l’AL, montant qui varie du double au simple en fonction du changement de statut de la personne.
- Inclure dans la construction des immeubles des jardins sociaux potagers, pour augmenter en « nature » les revenus.
- Mise en place de réseaux d’échange de savoirs et de services : cuisine, bricolage, couture etc., qui favorisent la mixité des populations.
- Revaloriser l’image des quartiers qui ont été réhabilités et qui, malgré cela restent stigmatisés. Dans ce sens, créer des structures de vie de quartier et/ou dynamiser celles existantes.
* Aider à l’amélioration des comportements :
- Prendre en compte les difficultés de comportement (incivilités, dégradations, etc.) dès qu’elles se manifestent et assurer un accompagnement éducatif à l’entrée dans les lieux et aussi longtemps qu’il le faut (au lieu d’un an comme prévu généralement).
- Instaurer une mesure d’accompagnement à l’entretien du logement afin de garantir au propriétaire la non dégradation de son bien. Des expériences telles celle de l’agence sociale (AIVS) sur l’agglomération toulonnaise ou des Compagnons Bâtisseurs à Marseille sont à développer.
- Créer des ateliers de petits bricolages, par le biais des associations de locataires dans les groupes d’immeubles, afin de développer et mutualiser les compétences et réduire les frais.
- Développer la fonction de gardien ou de concierge chargé du suivi de l’immeuble, des petits travaux…
6. Rôle du travail social : accompagner, faciliter, innover
* Assurer un accompagnement sur le long terme :
- Accompagner le locataire sur deux niveaux : niveau financier (assurer le paiement du loyer), et au niveau du comportement (apprendre à investir, à apprécier, à prendre soin de son logement).
- Assurer un travail éducatif après du locataire, notamment sur les charges maîtrisables.
- Réfléchir l’accompagnement sur le long terme, deux ou trois ans après, assurer un suivi.
- Susciter l’adhésion de la personne, du locataire dès la phase accès au logement en posant clairement les enjeux.
- Assurer un double accompagnement des locataires ET des propriétaires. Les propriétaires demandent à être reçus par les services sociaux et les associations liées au logement ; beaucoup jouent le jeu du FSL et souhaitent être plus entendus et accompagnés sur le long terme.
- Systématiser l’accompagnement social en réservant une autre place aux propriétaires. Permettre au propriétaired’avoir un référent social rencontré au moment de la signature du bail.
- Donner le temps nécessaire à l’accompagnement, cette notion de temps semble indispensable
* Faciliter et créer des ponts et des liens :
- Imaginer des ponts entre les parties : locataires, bailleurs, institutions sociales
- Assurer un rôle de « médiation » entre chacun. Dans chaque association ou dans la Maison de l’Habitat, créer un service avec une personne chargée du suivi avec chaque partie. Cette personne doit être formée, mobilisée et spécialisée.
- Améliorer les rapports entre les locataires et offices d’HLM : le locataire est une personne et non un dossier.
- Trouver plus de souplesse dans les liens entre les bailleurs et les travailleurs sociaux, notamment du Conseil Général.
- Assurer des passerelles d’information et de coordination.
En conclusion « ENSEMBLE LEVONS LES FREINS ! »
il apparaît plus que jamais nécessaire pour les services sociaux d’innover et être force de propositions :
- Imaginons un réel travail en réseau sur le même principe et fonctionnement que les REAAP (Réseau d’Ecoute, d’Appui et d’Accompagnement à la Parentalité). Ce réseau serait centralisateur et servirait de relais pour les questions de logement.
- Créons des structure de coordination sur le logement qui répondent en priorité à la demande sociale
- Mettons en place des postes de médiateurs, avec une formation initiale de travailleur social.
- Créons des nouveaux partenariats avec des organismes privés : élargir, ouvrir.
- Favorisons la création d’ateliers « échanges de savoirs », « petit bricolage ». Les élargir à un public non bénéficiaire des minima sociaux.
- Organisons et faisons circuler l’information sur le logement.
Les travailleurs sociaux seuls ne pourront rien. Seule une véritable mobilisation de proximité avec l’ensemble des acteurs mais aussi la population concernée peut permettre d’enrayer un processus qui exclue des familles entières de l’accès au logement sur des critères uniquement économiques. Notre capacité d’accueillir, d’apporter un toit et une sécurité à la population la plus exclue est la mise en œuvre d’un des fondements du pacte républicain : celui qui repose sur la fraternité. Le bien être de tous passe aussi par le bien être des plus fragiles. C’est aussi pourquoi il nous apparaît primordial d’agir de toute urgence sur la question de l’accès au logement qui reste au cœur de la question sociale aujourd’hui.