L'ANAS réfute les arguments du département du Haut-Rhin qui conditionne le versement du RSA à 7 heures de bénévolat par semaine




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En décidant d'imposer aux allocataires du RSA, qui ne seraient pas en démarche d'insertion professionnelle, un temps bénévole qu'ils devraient accomplir chaque semaine, le président du Conseil Départemental du Haut-Rhin détourne la finalité même du bénévolat. En effet, celui-ci ne serait plus librement consenti mais deviendrait une condition permettant de percevoir une allocation.
 
Or le bénévolat est une activité libre, qui n'est encadrée par aucun statut. Il existe cependant une définition, non juridique, communément admise : « est bénévole toute personne qui s'engage librement pour mener une action non salariée en direction d'autrui, en dehors de son temps professionnel et familial »[1].
 
Le département du Haut-Rhin institue une nouvelle règle qui impose que le bénévolat puisse être exercé sous contrainte à compter de janvier 2017. Cela induit le risque, en cas de refus, de se voir supprimer cette allocation de subsistance qu'est le RSA, dont on sait qu'elle permet à peine de satisfaire aux besoins essentiels de la vie courante. Déjà en mai 2011, Laurent Wauquiez, alors ministre des affaires européennes, avait souhaité déposer une proposition de loi pour obliger les bénéficiaires du RSA à une obligation de travail hebdomadaire nommée « service social ». L'ANAS avait dénoncé cette accusation de « dérives de l'assistanat »[2] proférée par le ministre à l'encontre des plus pauvres.
 
Le Conseil Départemental du Haut-Rhin propose de créer une plate forme numérique permettant de mettre en relation les bénéficiaires du RSA et des associations ayant des besoins de bénévoles. Ceci revient à simplifier à l'extrême les besoins des uns et des autres et risque de placer les bénéficiaires du RSA face à des difficultés plus grandes encore que celles qu'ils connaissent car, qui décidera du choix et du lieu de l'activité et qui en assurera le suivi ?
 
Instituer une obligation d'engagement bénévole contre le versement d'un revenu permet de considérer que l'acte bénévole devient rémunéré. Il y a en effet directement lien de cause à effet : poser un acte par essence gratuit devient rémunérateur et l'acte n'est alors plus gratuit. Or il faut pouvoir choisir : soit le bénévolat est choisi par la personne sans contrainte et cela est un véritable acte bénévole, soit celui-ci est contraint, et dans ce cas la personne n'est plus bénévole, elle perçoit un bénéfice lié à la contrainte imposée.
 
Cette décision pose une autre question car elle provoque une rupture d'égalité de traitement des citoyens résidant en France qui sont susceptibles de bénéficier de cette allocation. La condition d'accès au RSA changerait selon le département de résidence.
 
Le RSA est le dernier filet de protection pour les personnes qui n'ont plus aucun revenu. Considérer que celui-ci doit être conditionné à une activité non rémunérée alors que la très grande majorité des allocataires souhaite travailler et percevoir un salaire est une nouvelle violence imposée et un déni de la problématique que rencontrent nos concitoyens les plus fragiles et de la réalité économique de notre pays.
 
Pour autant, il reste important de rappeler combien le bénévolat est une valeur positive dès lors que celui-ci est tourné vers le mieux vivre ensemble et la solidarité entre tous.
 
Derrière cette décision se pose une question de financement et surtout de droit. Selon les propos recueillis par différents médias, le président de la collectivité voit dans ce dispositif une autre plus-value que la sortie de l’isolement des allocataires : « on va peut-être détecter un certain nombre de bénéficiaires qui seront en incapacité d’effectuer une activité bénévole. Dans ce cas, ils relèvent de l’invalidité, qui est prise en charge par la sécu, et pas du RSA. Cela pourrait être des pistes d’économies immédiates ». Rappelons toutefois que le code de la sécurité sociale s’appuie sur les activités rémunérées par les salariés pour octroyer le bénéfice de pensions. Rappelons également que le Conseil Départemental n’est pas compétent pour évaluer la situation d’invalidité des allocataires du RSA.
 
Le Conseil Départemental du Haut-Rhin s’affranchit à travers cette décision de toute politique de l’emploi en imposant aux citoyens de réaliser une activité bénévole qui est susceptible de sortir du cadre associatif. Les propositions vont en effet jusqu’à envisager le bénévolat en maisons de retraite ou autres établissements publics, sur des activités qui pourraient tout à fait être rémunérées.
 
La Ministre des affaires sociales, Marisol Touraine, a réagi ce jour en affirmant que « Le droit est défini nationalement et [qu’]il n'est pas possible de conditionner le versement du RSA à l'exercice du bénévolat ou de telle activité ». L’ANAS sera toutefois vigilante aux suites données à cette décision, le Conseil Départemental étant prêt à déposer une question prioritaire de constitutionnalité à ce sujet.
 
 
 
Le Conseil d'Administration de l'ANAS
Le 8 février 2016
 
[1]     Avis du Conseil Economique et Social du 24 Février 1993
[2]     Communiqué ANAS du 9 Mai 2011

communiqué RSA contre bénévolat.pdf  (489.06 Ko)


Mardi 9 Février 2016

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