Autres articles
-
9 octobre 2021 - Journée d'étude de la section Pyrénées : Assistant.e de service social : combats passés, présents et à venir… Qu’en est-il aujourd’hui ?
-
Accueillir, rencontrer, accompagner. De l’accès aux droits fondamentaux à la promotion de la personne.
-
JNE 2017 : Retour en texte et en images
-
Journée d'étude de l'ANAS le 13 octobre prochain : Le Programme
-
Découvrez le résumé des JNE 2014 par Jacques TREMINTIN
Bonjour,
Je suis heureuse de pouvoir partager avec vous ces nouvelles journées d’études de l’ANAS qui se proposent de mettre en travail la visibilité et l’invisibilité du travail social dans la société française aujourd’hui. Plusieurs éléments nous y ont amenés.
La crise, et les orientations économiques actuelles, se traduisent par des réductions budgétaires pour tout ce qui touche directement et indirectement aux services publics. En conséquence, elles ont un fort impact sur les populations de manière générale, et plus particulièrement pour les personnes en situation de précarité ou de fragilité. En plus de voir leur précarité s’accroitre, elles risquent à terme de trouver de moins en moins de réponses à leurs difficultés. Les solidarités et les protections sociales s’amenuisent.
En parallèle, de nouveaux modes d’évaluation des politiques publiques et des pratiques institutionnelles émergent. Elles interrogent l’adéquation entre les moyens donnés aux services publics et les résultats obtenus. De même, elles tendent à impulser voire imposer de nouveaux modes de gestion des institutions fortement marqués par des logiques issues du monde de l’entreprise.
Cela créé un choc de cultures : le travail social n’est pas une marchandise, pas plus qu’il n’en produit. Nous n’avons pas d’obligation de résultat mais une obligation de moyens. Or, même si cette affirmation a du sens pour nous, il nous est souvent demandé d’en démontrer la pertinence dans une société où les moyens se font rares et ne sont alloués qu’au regard d’un résultat mesurable ou quantifiable. Au travers de l’interrogation de son coût, c’est l’efficacité du travail social qui est quelquefois remise en question, et au-delà son utilité dans notre société.
Le travail social est plutôt méconnu dans ses pratiques tout autant que dans ses fondements et son rôle dans la société. Cette méconnaissance permet beaucoup de projections phantasmatiques et nous en connaissons tous…. Elle peut permettre aussi une instrumentalisation du travail social selon des intérêts divers, parfois contraires aux finalités que nous poursuivons, je veux parler du mieux vivre ensemble, de la lutte contre l’exclusion, du renforcement de la cohésion sociale et de la défense de la justice sociale.
Pourtant, nous ne parvenons pas complètement à rendre visibles ou lisibles la richesse de nos interventions et leurs effets réels. Nous le mesurons régulièrement par l’image véhiculée au travers des médias dans laquelle nous ne nous reconnaissons que très rarement.
Les différentes tendances politiques éclairent partialement et partiellement le travail social selon leurs besoins et quelquefois leurs idéologies, il devient au besoin une variable d’ajustement. Nous aiderions, par exemple, des assistés-fraudeurs à profiter du système en fermant les yeux sur les nombreuses fraudes afin de maintenir nos emplois. Quand des milliers d’intervention en protection de l’enfance permettent à des enfants d’être maintenus dans leur milieu familial tout en écartant le danger auquel ils sont confrontés, ce n’est qu’à l’occasion pourtant bien rare d’un drame tel que la mort d’un enfant que nous défrayons la chronique. Et à cette occasion les jugements sont sans appel. (Je vous incite à ce propos à aller lire le dossier « La vérité ne sort pas toujours de la Voix de l’Enfant » actuellement en ligne sur notre site.)
L’espace médiatique pourrait être utilisé pour permettre une meilleure compréhension de notre utilité mais les médias semblent pris dans des contraintes similaires aux nôtres : une société en pleine mutation dans ses modes de communication et d’information ; un impératif de rentabilité économique perturbant l’objectif initial visé, un rapport au temps qui évolue…
Par ailleurs, trop souvent, notre façon de communiquer ne convient pas aux formats attendus, tant dans leur contenu que dans leur forme ou leur durée. La méconnaissance réciproque de nos contraintes respectives rend plus difficile notre articulation.
Nous le savons, le travail social est à l’intersection entre individu et collectif, entre intime et public. La part visible de notre travail n’est que la partie émergée de l’ « iceberg » : expertise sociale, actions pour la défense des droits des personnes accompagnées, temps de réflexion, de coordination, de formation, analyse et création de réponses nouvelles à de nouvelles problématiques… Pourtant le travail social est mis à l’épreuve de son efficacité. On doute de lui. Aujourd’hui, il doit se mettre à nu, sous menace de se voir amputé des parties invisibles.
Certains professionnels parviennent à rendre visible l’invisible et le valoriser. Les modes de communication et les supports se diversifient : invitation des élus au résultat d’une action collective, film réalisé avec des bénéficiaires du RSA, émissions radio construites par des jeunes de la Protection Judiciaire de la Jeunesse, couvertures par les médias locaux d’initiatives comme l’ouverture d’une épicerie sociale dans un quartier, ateliers d’écriture ou écriture de livres, de récits de vie professionnelle, pièces de théâtre ou one man show comme le spectacle de Madame Olive présentant le métier d’assistante sociale…
Les professionnels ont toujours su démontrer comment la créativité fait partie des valeurs qui les fondent et guident leurs actions. Mobiliser leur créativité pour communiquer différemment semble un défi vital pour le travail social aujourd’hui, pour une meilleure compréhension et reconnaissance de son utilité dans la société. L’ANAS s’efforce d’y contribuer et vous invite à l’y rejoindre dans ce combat mais au regard de la participation au congrès, les professionnels semblent prêts, avec nous, à relever ce défi !
Nous sommes sûrs que la richesse des interventions à venir va y contribuer, tout autant que la multitude des rencontres et des échanges que ces journées d’études permettent. C’est pourquoi au nom de l’ANAS je vous remercie de votre présence et de votre contribution à la réflexion collective. Je remercie aussi, et surtout devrais-je dire, Françoise Léglise, Stéphanie Delbrel, Sandrine Dumaine et Aurélie Antipot pour avoir patiemment et minutieusement coordonné ces journées ainsi que celles et ceux de l’anas qui offrent leur temps et leurs compétences au service de l’association mais surtout au service des travailleurs sociaux, et enfin, je remercie chaleureusement Pierre Joxe qui nous fait le plaisir d’ouvrir nos journées. Son expérience à la croisée de différents chemins et son engagement actuel dans la justice des mineurs en font un interlocuteur pertinent et précieux à qui je cède à présent la place.
Je vous remercie!