Contribution de l’ANAS aux travaux autour du Livre Blanc du Haut Conseil du Travail Social
Déclaration de l’ANAS du 4 avril 2023
Un vocable approximatif réunit les titulaires des treize diplômes consacrés à la relation d'aide sous l'appellation de « travailleurs sociaux ». Il recouvre des réalités disparates et rassemble des qualifications variant du niveau 7 (Certificat d’Aptitude aux Fonctions de Directeur d'Établissement Social) au niveau 3 (Accompagnant Éducatif et Social). Le foisonnement de cette désignation affaiblit la lisibilité du travail social, déjà mise à mal par la conviction que son exercice pourrait se satisfaire de qualités personnelles ou de louables intentions. C’est ignorer que bien plus qu’affaire de cœur, le travail social est affaire de raison.
Depuis la création en 1932 du Brevet de capacité professionnelle d’assistant et d’assistante sociale de l’État français, le service social désigne un périmètre d’action particulier. Il s’agit de celui à partir duquel des professionnels dotés d'une connaissance approfondie des politiques sociales, préparés aux exigences de l’accompagnement psycho-social individuel ou collectif et animés d'une forte volonté de promouvoir des valeurs humanistes de progrès et de justice sociale, accueillent, conseillent, soutiennent et orientent les publics qu’ils accompagnent. Ils mobilisent autant que possible les ressources (sociales, administratives, culturelles, économiques…) présentes sur leur territoire d’exercice. L’année 1946 marqua une étape particulière pour cette profession qui accéda à la protection légale de son titre et à l'exigence de respect du secret professionnel. Une association professionnelle, l’Association Nationale des Assistants de Service social (ANAS), se dote peu après d'un code de déontologie. Bien que dépourvu de légitimité législative, sa permanence et son historicité lui confèrent l'aura d'un élément de doctrine. Sa référence dans plusieurs décisions de justice étoffent ce poids.
Depuis le mois de juillet 2016, l'ANAS contribue aux travaux du Haut Conseil du Travail Social. Au sein du collège des professionnels du secteur social et médico-social, ses représentants s’efforcent de clarifier et assurer les valeurs qui animent l’action des assistants sociaux. En toutes circonstances et grâce à leur engagement, ils promeuvent la dignité et la juste place de l’être humain. Loin des simplifications hâtives, ils composent avec des représentations qui génèrent nombre d'incompréhensions pesant simultanément sur les attentes des personnes accompagnées et des décideurs.
Soucieux de poursuivre sa tâche, le conseil d’administration de l’ANAS répond à la proposition présentée par le président du HCTS au mois de février 2023. En complément des positions énoncées par les membres de l’ANAS engagés au sein des différentes commissions de cette instance, 3 axes de recommandations s'imposent dans le contexte actuel:
Développer la lisibilité des missions du travail et du service social
a) organiser des campagnes de communication centrées sur les spécificités du service social qui oeuvre en toute circonstance à une meilleure harmonie entre les personnes accompagnées et leur environnement
b) relayer au niveau national la journée mondiale du travail social
c) clarifier la complémentarité des 13 professions du travail social
Garantir un meilleur service aux personnes accompagnées
a) dissocier le service social des logiques de prestations de service immédiates, en reconnaissant que le temps nécessaire à l'établissement d'une relation propice à la confiance, participe de leur action
b) évaluer les actions à l'aune du niveau de participation effective des personnes accompagnées
c) créer un corps professionnel spécialisé dans les interventions suppléantes auprès des personnes concernées par les dispositifs de protection des majeurs vulnérables
d) créer l’instance professionnelle des assistants de service social garantissant aux personnes accompagnées: la compétence des professionnels et la meilleure qualité des accompagnements
Améliorer le champ d'initiative des assistantes sociales
a) confiner le lien de subordination du contrat de travail des assistants sociaux aux seuls aspects organisationnels
b) limiter la ligne hiérarchique des assistantes sociales à des personnels au moins titulaires d’un Diplôme d’Etat d’assistant de service social
c) rattraper les retards de rémunération accumulés depuis plusieurs années et les aligner sur les standards européens
d) gratifier la stabilité des professionnels qui participent à la continuité des institutions
e) inscrire des actions de recherche menées par les assistants sociaux au nombre des missions incontournables des institutions employeuses
f) promouvoir et gratifier l’exercice et la participation à la formation et certification des assistants de service social
Le service social exige bien plus que la connaissance des dispositifs de protection sociale ou de renforcement de la cohésion sociale. Il rassemble des actions dont la finalité vise à réduire les distorsions qui éloignent la vie menée par les individus ou les groupes d’individus de leurs projets émancipateurs. Il tend au rapprochement des aspirations humaines et de l’organisation sociale.
L’exercice de l’autonomie et la prise de responsabilité par les personnes accompagnées désignent l’objectif des assistantes de service social. La congruence et l’intérêt des personnes qu’ils accompagnent sont indissociables de leur travail. Les assistants sociaux savent que le sens de leur travail se trouve dans la lutte contre les inégalités, la constante recherche de compréhension des actions individuelles et l’inaltérable promotion de la dignité humaine. L'avenir du travail social passe par la reconnaissance de ses spécificités. Trop souvent perçu comme un appendice, pour ne pas dire un accessoire, de champs de connaissances bénéficiant d'une forte légitimité (le droit, la médecine, l'économie...), il survivra et poursuivra sa tâche en soutenant son parti-pris de respecter la parole et les choix de chacun, pourvu qu'ils s'inscrivent dans une perspective émancipatrice.
Le Conseil d’Administration de l’ANAS