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" Puisque les ASH ouvrent leurs colonnes à la polémique sur le mémoire du DEAS, il nous semble important que les différents courants s’expriment. Selon notre avis, Madame Noalhyt se trompe d’enjeu dans la position qu’elle défend dans le courrier publié le 20 juin 2003.
Le mémoire de fin de formation n’est pas, comme elle le prétend, un rite d’initiation. Il a une longue histoire et s’enracine dans l’évolution nationale et internationale de la formation au Service Social. Le premier diplôme de 1932 prévoyait 4 ans d’études, deux théoriques et deux pratiques et un mémoire de fin de formation soutenu oralement. La fusion en 1938 avec le diplôme d’infirmière visiteuse entraîna une déqualification certaine et la suppression de cette épreuve. Depuis, à chaque reforme des études, la profession s’est battue pour que le mémoire de fin d’études soit remis au programme. Il a fallu, en France attendre 42 ans pour réintroduire cette épreuve au Diplôme d’Etat. Ce mémoire d’initiation à la recherche existait par ailleurs dans la majorité des pays d’Amérique (du sud et du nord) et dans bon nombre de pays européens.
En 1980, le véritable enjeu du mémoire du DEAS est de positionner notre profession parmi les disciplines capables d’élaborer leurs propres connaissances, de conceptualiser leurs pratiques, de cumuler et transmettre leur savoir propre. Les débats sur le service social comme lieu d’application des sciences sociales ou comme étant capable de prendre une place active à la recherche, le débat sur la recherche « en » travail social ou « sur » le travail social ont balisé la réflexion des années 1980-90. La perspective de la recherche en travail social et des praticiens-chercheurs s’est développé poussé par la réforme du DEAS de 1980 et par le DSTS de 1978. Ce débat a été porté à l’époque par le Comité National des Ecoles de Service Social et par le Comité de Liaison des Centres de Formation Permanente et Supérieure en Travail Social. Colloques, journées d’études, séminaires, un nombre important de mémoires de formation initiale et supérieure ont assis la légitimité des professionnels à faire de la recherche, à être des acteurs de recherche dans leur domaine et non pas des simples pourvoyeurs de données à des « experts » en sciences humaines.
Si aujourd’hui nous pouvons tous nous réjouir de la création récente de la Chaire en Travail Social au CNAM, et de l’accès ainsi ouvert à des diplômes de 3ème cycle en travail social pour les professionnels, rappelons-nous que la première titulaire de la chaire, Madame Brigitte BOUQUET, est bien issue de cette dynamique qui revendique pour les professionnels une vrai place de chercheurs et des producteurs de leur propre savoir.
Regarder le mémoire de formation initiale en dehors de cette dynamique historique est réducteur. Ce mémoire doit s’inscrire comme le premier niveau de l’acquisition d’une démarche de recherche qui se poursuivra ensuite avec le DSTS, le DEA et le Doctorat. Ses ambitions doivent être grandes même si les moyens sont insuffisants. Les écoles se doivent de mettre en place les protocoles de formation suffisants pour l’acquisition de la démarche de recherche et des outils de recueil et d’analyse des données, et de donner visibilité à cet enseignement dans leur projet pédagogique. C’est à ce prix que les étudiants seront outillés pour mener une démarche rigoureuse et qui dépasse le stade de justification des pratiques que la collègue dénonce à juste titre.
On ne peut aboutir à cet apprentissage d’une démarche de recherche que si le mémoire de formation initiale est précisé dans sa fonction : non la production de connaissances mais l’apprentissage de la démarche de production de connaissances. Pour cela l’étudiant doit mettre en œuvre la démarche dans sa totalité : de l’élaboration d’une problématique et d’une hypothèse à une enquête de terrain utilisant les techniques de recueil et d’analyse des données des sciences sociales. C’est ainsi que les étudiants peuvent apprendre ce qu’est une recherche. Celle ci n’est pas un alignement de concepts et théories aboutissant à une hypothèse mais bien une confrontation à des données de terrain. Comment peut-on confronter « une réelle réflexion théorique » au « discours tenu par les acteurs du champ de leur thématique » comme le dit Mme Noalhyt sans utiliser des techniques rigoureuses de recueil de ce discours et de son analyse.
En conséquence, il faut pour la certification du domaine de compétences « Expertise sociale », un mémoire permettant l’apprentissage de la totalité de la démarche de recherche, pouvant faire référence à des champs disciplinaires variés (sociologie, psychologie, ethnologie, histoire, économie) et sur des thèmes qui ne se limitent pas au regard sur la pratique des assistants sociaux.
Cristina DE ROBERTIS
Henri PASCAL
Cristina DE ROBERTIS
Directrice de l’Institut de Formation en Travail Social de la Croix-Rouge Française - Var
Directrice de collection Politiques et interventions sociales aux Editions ENSP
Auteur de livres sur la méthodologie professionnelle
Représentant l’ANAS aux groupes de travail de la DGAS « Certification » et « Référentiel de formation théorique ».
Henri PASCAL
Formateur Institut Régional en Travail Social PACA-Corse - Marseille
Responsable de la formation à la recherche de la filière Assistant de Service Social
Directeur de recherche de mémoires au DSTS - Région PACA
Directeur de collection Politiques et interventions sociales aux Editions ENSP
Auteur d’articles et ouvrages sur l’histoire et la méthodologie en travail social
Le mémoire de fin de formation n’est pas, comme elle le prétend, un rite d’initiation. Il a une longue histoire et s’enracine dans l’évolution nationale et internationale de la formation au Service Social. Le premier diplôme de 1932 prévoyait 4 ans d’études, deux théoriques et deux pratiques et un mémoire de fin de formation soutenu oralement. La fusion en 1938 avec le diplôme d’infirmière visiteuse entraîna une déqualification certaine et la suppression de cette épreuve. Depuis, à chaque reforme des études, la profession s’est battue pour que le mémoire de fin d’études soit remis au programme. Il a fallu, en France attendre 42 ans pour réintroduire cette épreuve au Diplôme d’Etat. Ce mémoire d’initiation à la recherche existait par ailleurs dans la majorité des pays d’Amérique (du sud et du nord) et dans bon nombre de pays européens.
En 1980, le véritable enjeu du mémoire du DEAS est de positionner notre profession parmi les disciplines capables d’élaborer leurs propres connaissances, de conceptualiser leurs pratiques, de cumuler et transmettre leur savoir propre. Les débats sur le service social comme lieu d’application des sciences sociales ou comme étant capable de prendre une place active à la recherche, le débat sur la recherche « en » travail social ou « sur » le travail social ont balisé la réflexion des années 1980-90. La perspective de la recherche en travail social et des praticiens-chercheurs s’est développé poussé par la réforme du DEAS de 1980 et par le DSTS de 1978. Ce débat a été porté à l’époque par le Comité National des Ecoles de Service Social et par le Comité de Liaison des Centres de Formation Permanente et Supérieure en Travail Social. Colloques, journées d’études, séminaires, un nombre important de mémoires de formation initiale et supérieure ont assis la légitimité des professionnels à faire de la recherche, à être des acteurs de recherche dans leur domaine et non pas des simples pourvoyeurs de données à des « experts » en sciences humaines.
Si aujourd’hui nous pouvons tous nous réjouir de la création récente de la Chaire en Travail Social au CNAM, et de l’accès ainsi ouvert à des diplômes de 3ème cycle en travail social pour les professionnels, rappelons-nous que la première titulaire de la chaire, Madame Brigitte BOUQUET, est bien issue de cette dynamique qui revendique pour les professionnels une vrai place de chercheurs et des producteurs de leur propre savoir.
Regarder le mémoire de formation initiale en dehors de cette dynamique historique est réducteur. Ce mémoire doit s’inscrire comme le premier niveau de l’acquisition d’une démarche de recherche qui se poursuivra ensuite avec le DSTS, le DEA et le Doctorat. Ses ambitions doivent être grandes même si les moyens sont insuffisants. Les écoles se doivent de mettre en place les protocoles de formation suffisants pour l’acquisition de la démarche de recherche et des outils de recueil et d’analyse des données, et de donner visibilité à cet enseignement dans leur projet pédagogique. C’est à ce prix que les étudiants seront outillés pour mener une démarche rigoureuse et qui dépasse le stade de justification des pratiques que la collègue dénonce à juste titre.
On ne peut aboutir à cet apprentissage d’une démarche de recherche que si le mémoire de formation initiale est précisé dans sa fonction : non la production de connaissances mais l’apprentissage de la démarche de production de connaissances. Pour cela l’étudiant doit mettre en œuvre la démarche dans sa totalité : de l’élaboration d’une problématique et d’une hypothèse à une enquête de terrain utilisant les techniques de recueil et d’analyse des données des sciences sociales. C’est ainsi que les étudiants peuvent apprendre ce qu’est une recherche. Celle ci n’est pas un alignement de concepts et théories aboutissant à une hypothèse mais bien une confrontation à des données de terrain. Comment peut-on confronter « une réelle réflexion théorique » au « discours tenu par les acteurs du champ de leur thématique » comme le dit Mme Noalhyt sans utiliser des techniques rigoureuses de recueil de ce discours et de son analyse.
En conséquence, il faut pour la certification du domaine de compétences « Expertise sociale », un mémoire permettant l’apprentissage de la totalité de la démarche de recherche, pouvant faire référence à des champs disciplinaires variés (sociologie, psychologie, ethnologie, histoire, économie) et sur des thèmes qui ne se limitent pas au regard sur la pratique des assistants sociaux.
Cristina DE ROBERTIS
Henri PASCAL
Cristina DE ROBERTIS
Directrice de l’Institut de Formation en Travail Social de la Croix-Rouge Française - Var
Directrice de collection Politiques et interventions sociales aux Editions ENSP
Auteur de livres sur la méthodologie professionnelle
Représentant l’ANAS aux groupes de travail de la DGAS « Certification » et « Référentiel de formation théorique ».
Henri PASCAL
Formateur Institut Régional en Travail Social PACA-Corse - Marseille
Responsable de la formation à la recherche de la filière Assistant de Service Social
Directeur de recherche de mémoires au DSTS - Région PACA
Directeur de collection Politiques et interventions sociales aux Editions ENSP
Auteur d’articles et ouvrages sur l’histoire et la méthodologie en travail social