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Les éléments positifs :
Dès l'article 1, l'affirmation du primat de l'autorité judiciaire et du pouvoir du représentant de l'Etat face aux prérogatives nouvelles données aux maires.
Une relative clarification sur les modalités d'échange d'information devant être précisées dans des conventions. (art. 4)
Une nouvelle rédaction de l'article 5 du projet de loi qui se traduit par
- L'abandon du systématisme dans l'obligation d'informer le maire de la commune des personnes qui « rencontrent des difficultés sociales, éducatives ou matérielles ». Dans cet article il n'est désormais fait état d'une exigence que lorsque « la gravité des difficultés sociales, éducatives ou matérielles » d'une personne ou d'une famille « appelle l'action de plusieurs intervenants ». Pour autant nous nous interrogeons sur le terme de gravité : cette appréciation est sujette à de multiples interprétations
- La nécessité pour le maire de consulter le Président du Conseil Général
Le troisième alinéa relativise l’obligation de partager les informations et documents en stipulant « sont autorisés à partager » au lieu de « partagent ». Nous quittons là le domaine de l'obligation. D’ailleurs, l’article 226-14 du Code Pénal stipule : « L’article 226-13 ( sur le secret professionnel) n’est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. » Nous passons donc de l’imposition à l’autorisation.
Cette nouvelle rédaction de l'article 5, bien qu’écrite à partir d'une affirmation non vérifiée ni établie ( l'absence de coordination des services sociaux ), donne désormais aux professionnels une petite marge de manoeuvre leur permettant de travailler avec les familles dans le respect de la parole donnée ce qui n'était pas le cas précédemment.
Cependant, dans le projet de loi sur la protection de l’enfance, la question du partage d’information va dorénavant au-delà des engagements pris et jusqu’alors tenus par le ministère de la famille. Ainsi, l’article 5 du projet prévoit qu’en plus des professionnels soumis au secret professionnel et participant aux missions de protection de l’enfance, ceux « qui mettent en œuvre la politique de protection de l’enfance » ou qui « lui apportent leur concours » seraient concernés. Le flou de ces expressions laisse une marge d’appréciation trop large et pourrait permettre des dérives graves.
Revenons au projet de loi sur la prévention de la délinquance :
Sur le Conseil des droits et devoirs des familles la nouvelle rédaction demande au conseil d'examiner avec les familles les mesures d'accompagnement parental susceptibles d'être proposées et de consulter les travailleurs sociaux. Le maire ne décide plus seul la mesure d'accompagnement parental.
Pour autant de nombreux points restent particulièrement insatisfaisants :
Les éléments négatifs :
- Le contrat parental n'est pas un contrat qui peut être librement consenti. Il s'agit en l'état d'une contrainte susceptible d'être prescrite aux parents avec peu de possibilité de recours de leur part. L'expérience a prouvé que l’aide imposée est très souvent inefficace,
- Le maire reste au centre d'un dispositif de surveillance et de contrôle à partir d’un fichier recueillant des informations alimentées par les services de la CAF et de l'Education Nationale
- L’article 16 prévoit toujours une possibilité de levée du secret professionnel pour les médecins qui signaleraient une situation de violence conjugale sans accord de la victime, condition exigée jusqu’alors. Cela nuit au travail du médecin mais aussi des travailleurs sociaux et entraîne un risque de silence de la part des personnes victimes de tels faits, leur demande de secret ne pouvant plus être garantie en cas d’examen médical.
- Les injonctions thérapeutiques ont depuis longtemps montré leurs limites. Leur systématisation est en conséquence une mesure inadaptée car on ne peut soigner un malade efficacement contre sa volonté.
- La constitution d'un fichier national des personnes hospitalisées d'office place les sujets malades dans la position de coupables potentiels ou du moins de suspects systématiques.
- Le chapitre VII sur la délinquance des mineurs met en oeuvre les mesures de comparution immédiates et le raccourcissement des délais de comparution des mineurs ne permettent pas de rechercher le sens des actes posés et le contexte dans lequel ils ont été commis. Ils favorisent une logique où la sanction rapide prime sur la réparation.
- Cette logique de sanction justifie à elle seule un chapitre (VIII). La sanction associée à la réparation se traduit par la mise en place d'un système de réparation financière accessible aux seules personnes disposant de revenus suffisants. Cette mesure risque de renforcer une forme d'inégalité par l'argent.
- Rappelons aussi que ce texte concerne la prévention de la délinquance et de sa récidive. Prévenir signifie agir avant qu'un acte soit commis. Comment et que sanctionner si l'acte délictueux n'a pas encore été commis ? La sanction ne devrait pas être un élément de prévention mais seulement un élément de condamnation dans le cadre d'un jugement.
- L'absence de moyens apportés aux acteurs de la prévention interroge même la possibilité réelle d'action. Qui par exemple financera les éventuelles mesures de tutelles aux prestations, les suivis thérapeutiques, le travail spécifique du coordonnateur ? Comment nouvelles dispositions seront elles mises en oeuvre et avec quels professionnels ? Le projet de loi est bien silencieux à ce sujet.
Enfin nous constatons qu'à aucun moment dans ce projet de loi il n'est fait état des principes internationaux sur la prévention de la délinquance des mineurs signés par la France et qui rappellent
1. Pour que la prévention de la délinquance juvénile porte ses fruits, il faut que la société tout entière assure le développement harmonieux des adolescents en respectant leur personnalité et en favorisant l'épanouissement des jeunes dès la plus tendre enfance.
2. .../... Les jeunes devraient avoir un rôle actif de partenaires dans la société et ne pas être considérés comme de simples objets de mesures de socialisation ou de contrôle.
3. .../... tout programme de prévention devrait, conformément aux systèmes juridiques nationaux, être axé sur le bien-être des jeunes dès la petite enfance.
4. Il faudrait reconnaître la nécessité et l'importance d'adopter des politiques de prévention de la délinquance nouvelles ainsi que d'étudier systématiquement et d'élaborer des mesures qui évitent de criminaliser et de pénaliser un comportement qui ne cause pas de dommages graves à l'évolution de l'enfant et ne porte pas préjudice à autrui.
Ces 4 principes issus de la résolution 45/112 des principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad) adoptés et proclamés par l'Assemblée générale du 14 décembre 1990 n'apparaissent pas dans ce projet de loi alors que la France a signé cette convention internationale. Qu'en est -il de ces principes ? La question reste posée.
Dès l'article 1, l'affirmation du primat de l'autorité judiciaire et du pouvoir du représentant de l'Etat face aux prérogatives nouvelles données aux maires.
Une relative clarification sur les modalités d'échange d'information devant être précisées dans des conventions. (art. 4)
Une nouvelle rédaction de l'article 5 du projet de loi qui se traduit par
- L'abandon du systématisme dans l'obligation d'informer le maire de la commune des personnes qui « rencontrent des difficultés sociales, éducatives ou matérielles ». Dans cet article il n'est désormais fait état d'une exigence que lorsque « la gravité des difficultés sociales, éducatives ou matérielles » d'une personne ou d'une famille « appelle l'action de plusieurs intervenants ». Pour autant nous nous interrogeons sur le terme de gravité : cette appréciation est sujette à de multiples interprétations
- La nécessité pour le maire de consulter le Président du Conseil Général
Le troisième alinéa relativise l’obligation de partager les informations et documents en stipulant « sont autorisés à partager » au lieu de « partagent ». Nous quittons là le domaine de l'obligation. D’ailleurs, l’article 226-14 du Code Pénal stipule : « L’article 226-13 ( sur le secret professionnel) n’est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. » Nous passons donc de l’imposition à l’autorisation.
Cette nouvelle rédaction de l'article 5, bien qu’écrite à partir d'une affirmation non vérifiée ni établie ( l'absence de coordination des services sociaux ), donne désormais aux professionnels une petite marge de manoeuvre leur permettant de travailler avec les familles dans le respect de la parole donnée ce qui n'était pas le cas précédemment.
Cependant, dans le projet de loi sur la protection de l’enfance, la question du partage d’information va dorénavant au-delà des engagements pris et jusqu’alors tenus par le ministère de la famille. Ainsi, l’article 5 du projet prévoit qu’en plus des professionnels soumis au secret professionnel et participant aux missions de protection de l’enfance, ceux « qui mettent en œuvre la politique de protection de l’enfance » ou qui « lui apportent leur concours » seraient concernés. Le flou de ces expressions laisse une marge d’appréciation trop large et pourrait permettre des dérives graves.
Revenons au projet de loi sur la prévention de la délinquance :
Sur le Conseil des droits et devoirs des familles la nouvelle rédaction demande au conseil d'examiner avec les familles les mesures d'accompagnement parental susceptibles d'être proposées et de consulter les travailleurs sociaux. Le maire ne décide plus seul la mesure d'accompagnement parental.
Pour autant de nombreux points restent particulièrement insatisfaisants :
Les éléments négatifs :
- Le contrat parental n'est pas un contrat qui peut être librement consenti. Il s'agit en l'état d'une contrainte susceptible d'être prescrite aux parents avec peu de possibilité de recours de leur part. L'expérience a prouvé que l’aide imposée est très souvent inefficace,
- Le maire reste au centre d'un dispositif de surveillance et de contrôle à partir d’un fichier recueillant des informations alimentées par les services de la CAF et de l'Education Nationale
- L’article 16 prévoit toujours une possibilité de levée du secret professionnel pour les médecins qui signaleraient une situation de violence conjugale sans accord de la victime, condition exigée jusqu’alors. Cela nuit au travail du médecin mais aussi des travailleurs sociaux et entraîne un risque de silence de la part des personnes victimes de tels faits, leur demande de secret ne pouvant plus être garantie en cas d’examen médical.
- Les injonctions thérapeutiques ont depuis longtemps montré leurs limites. Leur systématisation est en conséquence une mesure inadaptée car on ne peut soigner un malade efficacement contre sa volonté.
- La constitution d'un fichier national des personnes hospitalisées d'office place les sujets malades dans la position de coupables potentiels ou du moins de suspects systématiques.
- Le chapitre VII sur la délinquance des mineurs met en oeuvre les mesures de comparution immédiates et le raccourcissement des délais de comparution des mineurs ne permettent pas de rechercher le sens des actes posés et le contexte dans lequel ils ont été commis. Ils favorisent une logique où la sanction rapide prime sur la réparation.
- Cette logique de sanction justifie à elle seule un chapitre (VIII). La sanction associée à la réparation se traduit par la mise en place d'un système de réparation financière accessible aux seules personnes disposant de revenus suffisants. Cette mesure risque de renforcer une forme d'inégalité par l'argent.
- Rappelons aussi que ce texte concerne la prévention de la délinquance et de sa récidive. Prévenir signifie agir avant qu'un acte soit commis. Comment et que sanctionner si l'acte délictueux n'a pas encore été commis ? La sanction ne devrait pas être un élément de prévention mais seulement un élément de condamnation dans le cadre d'un jugement.
- L'absence de moyens apportés aux acteurs de la prévention interroge même la possibilité réelle d'action. Qui par exemple financera les éventuelles mesures de tutelles aux prestations, les suivis thérapeutiques, le travail spécifique du coordonnateur ? Comment nouvelles dispositions seront elles mises en oeuvre et avec quels professionnels ? Le projet de loi est bien silencieux à ce sujet.
Enfin nous constatons qu'à aucun moment dans ce projet de loi il n'est fait état des principes internationaux sur la prévention de la délinquance des mineurs signés par la France et qui rappellent
1. Pour que la prévention de la délinquance juvénile porte ses fruits, il faut que la société tout entière assure le développement harmonieux des adolescents en respectant leur personnalité et en favorisant l'épanouissement des jeunes dès la plus tendre enfance.
2. .../... Les jeunes devraient avoir un rôle actif de partenaires dans la société et ne pas être considérés comme de simples objets de mesures de socialisation ou de contrôle.
3. .../... tout programme de prévention devrait, conformément aux systèmes juridiques nationaux, être axé sur le bien-être des jeunes dès la petite enfance.
4. Il faudrait reconnaître la nécessité et l'importance d'adopter des politiques de prévention de la délinquance nouvelles ainsi que d'étudier systématiquement et d'élaborer des mesures qui évitent de criminaliser et de pénaliser un comportement qui ne cause pas de dommages graves à l'évolution de l'enfant et ne porte pas préjudice à autrui.
Ces 4 principes issus de la résolution 45/112 des principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad) adoptés et proclamés par l'Assemblée générale du 14 décembre 1990 n'apparaissent pas dans ce projet de loi alors que la France a signé cette convention internationale. Qu'en est -il de ces principes ? La question reste posée.